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Sunday, December 22, 2024

Patrimoine Mondiale de l’humanité pour l’île Maurice: La montagne du Morne Brabant

Paul. E. FrançoisSpécial pour CSMS MagazineProie des Vautours ou Totem?La montagne du Morne Brabant, ce site gigantesque et pittoresque, est devenu le bien mondial de l’humanité. Un statut qui l’extrait définitivement d’un oubli honteux et qui la place aujourd’hui dans les 20% des patrimoines non occidentaux reconnus par L’UNESCO. Il est indéniable qu’un tel honneur rejaillira sur toute la nation et va propulser davantage l’image de notre république démocratique sur le plan international.            S’il est légitime de se réjouir de cette reconnaissance,  toutefois  plane un intérêt inquiétant autour de ce site….            La Montagne du Morne désormais placée sous une certaine surveillance internationale, demeure toutefois plus que jamais exposée à la convoitise d’investisseurs. C’est un patrimoine situé dans un lieu paradisiaque, qui possède des atouts infra-structurels particuliers pour l’industrie touristique ou pour la construction de résidences haut de gamme. Cette région qui est habitée par le pan le plus marginalisé de notre société ; Ces laissés pour compte qui ont pendant toute l’histoire vécus au jour le jour, de génération en génération, comme apprentis du système esclavagiste, petits ouvriers ou pêcheurs. Les habitants du Morne ne seront certainement pas délocalisés pour autant, mais sont toutefois exposés à un dépaysement certain. Quoi qu’il en soit, c’est un atout culturel qu’il faudra absolument préserver. Malgré le risque du phénomène social de déculturation.            Il est évident que la montagne du Morne satisfait tous les critères officiels et précis établis par L’UNESCO, cela lui permettant d’acquérir un tel statut. Elle s’est donc retrouvée sur la liste de l’ensemble des sites internationaux, un label dont le but est de « protéger les biens naturels et culturels de valeur universelle exceptionnelle contre la menace d’un monde en évolution rapide »            Les discours d’aujourd’hui ne servent certainement à rien et on doit toujours prendre garde de toute exploitation ou de récupération politique de cette réussite. Il y a d’autres priorités qui relèvent directement de la volonté du pouvoir politique qui sont demeurées lettre morte depuis fort longtemps à l’exemple de cette appellation « n’importe » de population générale qui garde toute une communauté en otage. Enlevez donc cette étiquette qui ternit l’image de notre république. Il est plus louable aujourd’hui de rendre aux Créole l’identité qui leur est propre.            Il existe aussi cette volonté depuis la prise de conscience créole de 1993, avec L’OCAM, de réclamer une mise en valeur de tous les sites ayant marqué l’esclavage à la suite de quoi a été initié un modèle de pèlerinage intitulé « la route de l’esclave » qui avait mené jusqu’au village du Morne, en passant par Chamarel, les prisons d’esclaves de Constance et les églises bâties des mains d’esclaves. Et pendant les Assises créoles tenues au théâtre de Port-Louis, une demande était formulée, pour que la montagne du Morne Brabant soit décrété lieu de pèlerinage.            Il est important ici de préciser que les esclaves libérés prirent connaissance de décret de leur libération officielle en langue Kreol à la place de la cathédrale Saint Louis à midi le premier février 1835. Les autorités concernées et tous ceux soucieux de préserver les grands événements historiques devraient s’assurer que la place de la Cathédrale soit dotée d’un panneau illustrant ce décret textuel de la libération de l’esclavage.            La communauté créole dans son ensemble hérite, aujourd’hui, avec la nomination du Morne Brabant au rang de patrimoine mondial de l’humanité d’une « succession » acquise dans la douleur et dans la souffrance. La montagne du Morne qui se dresse majestueusement comme un socle devenu symbole de la résistance contre le système servile dans son manque de compassion le plus bestial. Un héritage imbibé de sang, de corps déchiquetés au nom de la dignité humaine terrassée par le rouleau compresseur du système colonial, bafouée par les injustices à relent raciste. Une dignité irrémédiablement tronquée par une certaine déculturation du pastoral néo-colonialiste de l’église catholique. Une dignité qu’elle va falloir retrouver, d’où l’enjeu pour la communauté créole d’aller à la reconquête de valeurs perdues.            Il ne s’agit pas d’attendre ce que les autorités comptent donner à la communauté créole, mais de s’avoir prendre de cette reconnaissance mondiale tout ce qui pourra faire avancer la communauté sur le long chemin qui se dresse devant elle.Voir aussi La Communauté Créole de l’île Maurice prise dans le joug des pouvoirs Haïti – Culture : Unité idéologique, politique dans les écrits et dans les actions chez Jacques RoumainPrésentation de Gouverneurs de la RoséeLE VERRE DU SOUVENIRNote : Paul. E. François est mauricien et il est engagé dans la lutte pour la promotion et l’émancipation de la communauté créole à l’île Maurice, l’une des plus belles îles du monde. Il fait parti du haut cadre d’une entreprise agricole mauricienne. Il est Ex-Secretaire général de l’OCAM (Organisation des créoles afro mauricienne) Organisation qui fut crée en 1993 et qui est à l’origine de  la prise de conscience créole. Il est notre nouveau collaborateur.

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