Par Marie-Jeannine Myrthil
CSMS Magazine Staff WriterParis—Après des semaines de rumeurs, le couple a finalement rendu public ce que tout le monde avait d’ores et déjà compris : le président de la République française et sa femme Cécilia ne formaient plus un couple heureux. Mais on ne pensait pas alors qu’ils iraient jusqu’au divorce. En effet, bon nombre de couples présidentiels français comme les Mitterrand ou les Chirac ne paraissaient pas très heureux ensemble. Cela ne leur a pas pour autant conduit au divorce. Chacun faisait de son mieux pour cacher le malaise. Mais Cécilia, elle, n’a pas voulu jouer à ce jeu qui aurait pu durer plus de quatre bonnes années. Ils vivaient ensemble depuis 1988. Mariés en 1996, elle donna naissance à leur fils Louis en 1997. Tout semble avoir commencé en 2005, lorsque Cécilia le quitta pour rejoindre Richard Attia, alors que Sarkozy vivait avec une journaliste. Puis, le couple s’est retrouvé. Mais malheureusement, dès le second tour de l’élection présidentielle, une certaine distance a pu être constatée entre les deux protagonistes puisque Cécilia n’a pas voté et de ce fait, n’a pas apporté un soutien officiel à son mari. Depuis, lors, on découvre une Cécilia de plus en plus distante, absente et un Nicolas, très amoureux. Que s’est-il passé pour que ce couple divorce alors que le peuple français vient d’élire Sarkozy à la tête de l’Etat ? De cela, on ne saura rien. D’ailleurs, cela ne regarde personne et relève exclusivement de leur vie privée. Juridiquement cependant, ce divorce qui constitue une première en France, est intéressant et cela du fait essentiellement que le président de la République jouit d’une immunité juridictionnelle. En effet, l’article 67 de la constitution française énonce que « Le Président de la République n’est pas responsable des actes accomplis en cette qualité, sous réserve des dispositions des articles 53-2 et 68. Il ne peut, durant son mandat et devant aucune juridiction ou autorité administrative française, être requis de témoigner non plus que faire l’objet d’une action, d’un acte d’information, d’instruction ou de poursuite. Tout délai de prescription ou de forclusion est suspendu. Les instances et procédures auxquelles il est ainsi fait obstacle peuvent être reprises ou engagées contre lui à l’expiration d’un délai d’un mois suivant la cessation des fonctions ». Nicolas et Cécilia Sarkozy ont opté pour un divorce par consentement mutuel, pensaient-ils sans doute que seul ce type de divorce leur était accessible. Mais pouvaient-ils valablement divorcer, autrement dit, le droit permet-il au chef de l’Etat français de divorcer ? Mais tout d’abord tentons de définir le divorce par consentement mutuel. Le droit français reconnaît quatre cas de divorce. En effet l’article 229 du Code civil[1] énonce que: « Le divorce peut être prononcé en cas :
- soit de consentement mutuel,
- soit d’acceptation du principe de la rupture du mariage,
- soit d’altération définitive du lien conjugal,
- soit de faute. »
L’article 230 ajoute que « le divorce peut être demandé conjointement par les époux lorsqu’ils s’entendent sur la rupture du mariage et ses effets en soumettant à l’approbation du juge une convention réglant les conséquences du divorce ». Ce cas de divorce est simplifié : une seule audience suffit pour faire entériner le divorce par le Juge aux Affaires familiales. Le délai de réflexion de trois mois disparaît. La durée de la procédure de divorce est donc diminuée. C’est un divorce nécessitant que les époux soient d’accord sur le principe et les conséquences du divorce. Le juge opère un contrôle sur la volonté de rompre le lien matrimonial. L’article 232 clarifie le dispositif en énonçant que :« Le juge homologue la convention et prononce le divorce s’il a acquis la conviction que la volonté de chacun des époux est réelle et que leur consentement est libre et éclairé. Il peut refuser l’homologation et ne pas prononcer le divorce s’il constate que la convention préserve insuffisamment les intérêts des enfants ou de l’un des époux ». Le juge aux affaires familiales va par ailleurs convoquer les parties. Ainsi selon l’article 205 du Code civil, « la demande en divorce est présentée par les avocats respectifs des parties ou par un avocat choisi d’un commun accord. Le juge examine la demande avec chacun des époux, puis les réunit. Il appelle ensuite le ou les avocats. » L’article 1092 du Nouveau code de procédure civile précise que « Le juge aux affaires familiales est saisi par la remise au secrétariat-greffe de la requête initiale, qui vaut conclusions. Il convoque chacun des époux par lettre simple expédiée quinze jours au moins avant la date qu’il fixe pour leur audition. Il avise le ou les avocats». Il en résulte que le Président de la République a été entendu par un juge et a fait l’objet d’une procédure civile or l’alinéa 2 de l’article 67 fait obstacle à une procédure pénale, civile ou administrative qui pourrait toucher ce dernier. Comment –a-t-il donc pu divorcer sans violer la constitution ? Un Chef de l’Etat peut-il se permettre de ranger son immunité dans un placard lorsque celle-ci devient encombrante et de la ressortir en cas de besoin ? Peut-on dire par contre dire que la procédure de l’article 67 est écartée car Sarkozy n’a pas été poursuivi mais qu’il a lui même entamé cette procédure ? Cette thèse pourrait être acceptée mais la Constitution n’avait pas voulu faire du divorce une dérogation à l’immunité juridictionnelle. D’autres questions qui ne seront pas traitées pourraient en outre contrevenir à ce divorce. On peut se demander par exemple si Nicolas Sarkozy sera poursuivi au cas où il ne respecterait pas les clauses afférentes au divorce ? Cécilia n’aura absolument pas la possibilité de le poursuivre si ce dernier ne versait plus de pension alimentaire par exemple ou s’il, ne respectait plus le mode de garde qui a été institué. Elle devra alors attendre qu’il ne soit plus président afin d’entamer une procédure de justice contre lui, puisqu’il jouit rappelons-le d’une immunité juridictionnelle. On a la preuve que N.Sarkozy n’est pas un citoyen quelconque, il est le premier des citoyens français et de ce fait, certaines procédures ne peuvent l’atteindre. Le désamour constitue une réalité qui peut toucher tout le monde, prince ou mendiant. Mais personne n’a le droit de ne pas respecter le droit ou de l’utiliser à son avantage car ce ne serait plus du droit.Note : Myrtil Marie Jeannine est etudiante en droit et vit à Paris. Elle peut être contactée à [email protected] ou à [email protected]Voir aussi Elections législatives : une majorité claire face à une opposition forte
[1] Le Code civil des Français ou Code Napoléon regroupe l’ensemble des textes relatifs au droit civil français c’est-à-dire les règles qui déterminent le statut des personnes, des biens,et des relations entre les personnes privées. Il a été promulgué le 21 mars 1804 par Napoléon Bonaparte.