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Friday, April 19, 2024

Les Sarkozy : entre divorce et problèmes juridiques

Par Marie-Jeannine Myrthil

 CSMS Magazine Staff WriterParis—Après des semaines de rumeurs, le couple a finalement rendu public ce que tout le monde avait d’ores et dĂ©jĂ  compris : le prĂ©sident de la RĂ©publique française et sa femme CĂ©cilia ne formaient plus un couple heureux. Mais on ne pensait pas alors qu’ils iraient jusqu’au divorce. En effet, bon nombre de couples prĂ©sidentiels français comme les Mitterrand ou les Chirac ne paraissaient pas très heureux ensemble. Cela ne leur a pas pour autant  conduit au divorce. Chacun faisait de son mieux pour cacher le malaise. Mais CĂ©cilia, elle, n’a pas voulu jouer Ă  ce jeu qui aurait pu durer plus de quatre  bonnes annĂ©es.            Ils vivaient ensemble depuis 1988. MariĂ©s en 1996, elle donna naissance Ă  leur fils Louis en 1997. Tout semble avoir commencĂ© en 2005, lorsque CĂ©cilia le quitta  pour rejoindre Richard Attia, alors que Sarkozy vivait avec une journaliste. Puis, le couple s’est retrouvĂ©. Mais malheureusement, dès le second tour de l’élection prĂ©sidentielle, une certaine distance a pu ĂŞtre constatĂ©e entre les deux protagonistes puisque CĂ©cilia n’a pas votĂ© et de ce fait, n’a pas apportĂ© un soutien officiel Ă  son mari. Depuis, lors, on dĂ©couvre une CĂ©cilia de plus en plus distante, absente et un Nicolas, très amoureux.            Que s’est-il passĂ© pour que ce couple divorce alors que le peuple français vient d’élire Sarkozy Ă  la tĂŞte de l’Etat ? De cela, on ne saura rien. D’ailleurs, cela ne regarde personne et relève exclusivement de leur vie privĂ©e.             Juridiquement cependant, ce divorce qui constitue une première en France, est intĂ©ressant et cela du fait essentiellement que le prĂ©sident de la RĂ©publique jouit d’une immunitĂ© juridictionnelle.            En effet, l’article 67 de la constitution française Ă©nonce que «  Le PrĂ©sident de la RĂ©publique n’est pas responsable des actes accomplis en cette qualitĂ©, sous rĂ©serve des dispositions des articles 53-2 et 68. Il ne peut, durant son mandat et devant aucune juridiction ou autoritĂ© administrative française, ĂŞtre requis de tĂ©moigner non plus que faire l’objet d’une action, d’un acte d’information, d’instruction ou de poursuite. Tout dĂ©lai de prescription ou de forclusion est suspendu. Les instances et procĂ©dures auxquelles il est ainsi fait obstacle peuvent ĂŞtre reprises ou engagĂ©es contre lui Ă  l’expiration d’un dĂ©lai d’un mois suivant la cessation des fonctions ».            Nicolas et CĂ©cilia Sarkozy ont optĂ© pour un divorce par consentement mutuel, pensaient-ils  sans doute que seul ce type de divorce leur Ă©tait accessible. Mais pouvaient-ils valablement divorcer, autrement dit, le droit permet-il au chef de l’Etat français de divorcer ?   Mais tout d’abord tentons de dĂ©finir le divorce par consentement mutuel. Le droit français reconnaĂ®t quatre cas de divorce. En effet l’article 229 du Code civil[1] Ă©nonce que:            « Le divorce peut ĂŞtre prononcĂ© en cas :

  • soit de consentement mutuel,
  • soit d’acceptation du principe de la rupture du mariage,
  • soit d’altĂ©ration dĂ©finitive du lien conjugal,
  • soit de faute. »

 L’article 230  ajoute que « le divorce peut ĂŞtre demandĂ© conjointement par les Ă©poux lorsqu’ils s’entendent sur la rupture du mariage et ses effets en soumettant Ă  l’approbation du juge une convention rĂ©glant les consĂ©quences du divorce ».            Ce cas de divorce est simplifié : une seule audience suffit pour faire entĂ©riner le divorce par le Juge aux Affaires familiales. Le dĂ©lai de rĂ©flexion de trois mois disparaĂ®t. La durĂ©e de la procĂ©dure de divorce est donc diminuĂ©e.            C’est un divorce nĂ©cessitant que  les Ă©poux soient d’accord sur le principe et les consĂ©quences du divorce. Le juge opère un contrĂ´le sur la volontĂ© de rompre le lien matrimonial.  L’article 232 clarifie le dispositif en Ă©nonçant que :«  Le juge homologue la convention et prononce le divorce s’il a acquis la conviction que la volontĂ© de chacun des Ă©poux est rĂ©elle et que leur consentement est libre et Ă©clairĂ©.  Il peut refuser l’homologation et ne pas prononcer le divorce s’il constate que la convention prĂ©serve insuffisamment les intĂ©rĂŞts des enfants ou de l’un des Ă©poux ».            Le juge aux affaires familiales va par ailleurs convoquer les parties. Ainsi selon l’article 205 du Code civil, « la demande en divorce est prĂ©sentĂ©e par les avocats respectifs des parties ou par un avocat choisi d’un commun accord. Le juge examine la demande avec chacun des Ă©poux, puis les rĂ©unit. Il appelle ensuite le ou les avocats. »             L’article 1092 du Nouveau code de procĂ©dure civile prĂ©cise que  «   Le juge aux affaires familiales est saisi par la remise au secrĂ©tariat-greffe de la requĂŞte initiale, qui vaut conclusions. Il convoque chacun des Ă©poux par lettre simple expĂ©diĂ©e quinze jours au moins avant la date qu’il fixe pour leur audition. Il avise le ou les avocats».            Il en rĂ©sulte que le PrĂ©sident de la RĂ©publique  a Ă©tĂ© entendu par un juge et a fait l’objet d’une procĂ©dure civile  or l’alinĂ©a 2 de l’article 67 fait obstacle Ă  une procĂ©dure pĂ©nale, civile ou administrative  qui pourrait toucher ce dernier. Comment –a-t-il donc pu divorcer sans violer la constitution ?            Un Chef de l’Etat peut-il se permettre de ranger son immunitĂ© dans un placard lorsque celle-ci devient encombrante et de la ressortir en cas de besoin ? Peut-on dire par contre dire que la procĂ©dure de l’article 67 est Ă©cartĂ©e car Sarkozy n’a pas Ă©tĂ© poursuivi mais qu’il a lui mĂŞme entamĂ© cette procĂ©dure ? Cette thèse pourrait ĂŞtre acceptĂ©e mais  la Constitution n’avait pas voulu faire du divorce une dĂ©rogation Ă  l’immunitĂ© juridictionnelle.             D’autres questions qui ne seront pas traitĂ©es pourraient en outre contrevenir Ă  ce divorce. On peut se demander par exemple si Nicolas Sarkozy sera poursuivi au cas oĂą il ne respecterait pas les clauses affĂ©rentes au divorce ? CĂ©cilia n’aura absolument pas la possibilitĂ© de le poursuivre si ce dernier ne versait plus de pension alimentaire par exemple ou s’il, ne respectait plus le mode de garde qui a Ă©tĂ© instituĂ©. Elle devra alors attendre qu’il ne soit plus prĂ©sident afin d’entamer une procĂ©dure de justice contre lui, puisqu’il jouit rappelons-le d’une immunitĂ© juridictionnelle. On a la preuve que N.Sarkozy n’est pas un citoyen quelconque, il est le premier des citoyens français et de ce fait, certaines procĂ©dures ne peuvent l’atteindre.            Le dĂ©samour constitue une rĂ©alitĂ© qui peut toucher tout le monde, prince ou mendiant. Mais  personne n’a le droit de ne pas respecter le droit ou de l’utiliser  Ă  son avantage car ce ne serait plus du droit.Note : Myrtil Marie Jeannine est etudiante en droit et vit Ă  Paris. Elle peut ĂŞtre contactĂ©e Ă  mjmyrthil@hotmail.com ou Ă  mjmyrthil@csmsmagazine.orgVoir aussi Elections lĂ©gislatives : une majoritĂ© claire face Ă  une opposition forte 


[1] Le Code civil des Français ou Code Napoléon regroupe l’ensemble des textes relatifs au droit civil français c’est-à-dire les règles qui déterminent le statut des personnes, des biens,et des relations entre les personnes privées. Il a été promulgué le 21 mars 1804 par Napoléon Bonaparte.

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