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Thursday, March 28, 2024

Haiti Couleur, Haiti Douleur

2eme PartieNous nous excusons aupres de nos lecteurs que la premiere partie n’a pas ete bien presentee. Ci-dessous est la deuxieme et derniere partie du texte. On peut lire la premiere partie sur la section “Dossier.”Par Gerald BloncourtLes peintres du Vaudou, des Scènes d’Histoire, des Rêves incantatoires, ne sont plus regardés comme de timides balbutieurs, comme de tendres maladroits. Une commande de fresques et de sculptures pour la Cathédrale de la Sainte Trinité à Port-au-Prince fait éclater leur Art dans la vie culturelle nationale et au delà des frontières du pays. L’art Haïtien est désormais porté sur les fonds baptismaux de l’Histoire et reconnu comme l’expression paroxystique de la nation. Le marché s’organise. Chaque peintre est considéré comme le faiseur possible d’une oeuvre de prix. Ce sont des centaines, voire des milliers d’artistes qui se font connaître ou se mettent à l’oeuvre, et le marché américain offre un incontestable champ à l’expansion de ces talents. C’est tout un peuple qui peint. Des “écoles” naissent, des galeries se créent. Les plus grands musées du monde ont aujourd’hui leurs peintres haïtiens.** *Je sais mes frères et soeurs de mon Haïti natale, que nombre d’entre vous créent chaque jour, dans nos villages, dans nos montagnes, des oeuvres merveilleuses encore inconnues, mais qui prendront place dans ce gigantesque trésor de notre Art national, dans l’immense héritage culturel de l’Humanité tout entière. Depuis plus de soixante ans, votre éblouissante création s’est révélée au monde. Les plus grands écrivains ont cité votre témoignage. Nombreux sont ceux qui ont essayé d’expliquer vos racines et vos sources. Tous demeurent figés dans l’interrogation, perplexes dans leurs réflexions. Je sais pour avoir vécu le plus lumineux de ma jeunesse dans l’atmosphère lourde et parfumée de notre terre, pour avoir été “natif-natal” de mon petit village de Bainet, à l’ouest de Jacmel, pour avoir été l’un des pionniers fondateurs de ce Centre d’Art, pour avoir participé au soulèvement des “Cinq  Glorieuses”, parce qu’il monte en moi, chaque jour que fait le soleil, un peu de mon pays, de ses cannes-à-sucre, comme un fond de tam-tam, des souvenirs d’ébène, de gaillac, de manguier, des rires, des claques dans le dos, des tremblements de terre, des palmiers et des lianes, des sapotilles, des quénêpes, des corosols, des cachimans, des boborits et du clairain, l’amidon, l’akassan, le sirop-doux, les goyaves et le choux-palmiste, parce qu’il monte en moi la rivière Moreau aux écailles d’argent, Bainet, Jacmel, Marigot, Pétionville, Kenscoff, Furçy, et le morne Bourette, et le Bassin-Bleu, le Morne l’Hôpital et le Fort Mercredi, et Port-au-Prince, et son île de la Gonave, et ses quartiers : Turgeau, Lalue, la ruelle Pican, je sais que votre art vient du fond de l’ESPOIR.ESPOIR gravé d’Afrique, buriné d’Amérique, sculpté des combats révolutionnaires de 1804, coloré des rythmes séculaires du Vaudou, peint des luttes incessantes de votre Histoire.Oui, HAITI-COULEUR-HAITI-DOULEUR, oui PEUPLE-PEINTRE, vos oeuvres sont le message d’amour et de dignité que vous lancez au Monde.Oui Jacques, vieux frère et compagnon de lutte, notre rêve n’est pas achevé, la lutte continue, et nos certitudes en un Monde meilleur que ton oeuvre a puissament contribué à édifier demeurent tel unsoleil pour les nouvelles générations.Vive Haïti ! Kenbe fèm ! Pa lage !                                                                Gérald BLONCOURT                                                                                Miami – Avril 1946

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